Lancées en 2011, les Assises stéphanaises de l’éducation questionnent, tous les deux ans, les processus éducatifs. Pour la 5e édition de ce rendez-vous qui réunit universitaires, acteurs de terrain et grand public, la journée de jeudi 28 novembre a permis de se pencher sur l’influence des espaces et des contextes familiaux sur la socialisation et l’éducation des enfants. Retour sur des échanges riches en enseignements et en interrogations.
Déclinée dans tous les champs – physique, moral, professionnel – la question du bien-être se pose aussi et de façon prioritaire à l’école. De moins en moins évidente à l’heure de la multiplication des phobies scolaires et autres troubles des apprentissages, elle est pourtant primordiale aux yeux de Maurice Mazalto, dont l’exposé a ouvert les échanges.
Apprenez à décrypter les intentions éducatives des espaces
Pour cet ingénieur, proviseur de lycée honoraire, le bien-être des élèves devrait guider la conception des espaces scolaires dans lesquels ils passent leurs journées. Aménagement du parvis, du hall d’accueil, de la cour de récréation, de la cantine, des toilettes… la qualité du cadre de vie n’est pas accessoire ! Bien au contraire, elle est mise – ou non – au service de la transmission des savoirs et de la socialisation des enfants, les deux grandes missions de l’école.
Si, comme l’a expliqué Maurice Mazalto, « le bâtiment n’est jamais neutre », c’est plus largement la relation des écoles à la cité qu’il faut prendre en compte, d’après Pascal Clerc, professeur de géographie à l’université de Cergy-Pontoise. Est-ce qu’on doit ouvrir les écoles au monde ou les en séparer ? Quelle est la liberté de circulation accordée aux enfants ? Doivent-ils être placés sous surveillance permanente ? Ces questions très politiques interrogent d’autant plus que la tendance actuelle est à une sécurisation à outrance, qui fait regretter à Pascal Clerc que « la question pédagogique soit dépassée par les enjeux de sécurité ».
De la théorie à la pratique
Les Assises ayant prévu de donner la parole à des acteurs de terrain, pour faire écho aux exposés des universitaires, Emmanuel Sannier, le directeur de l’Association du Centre social de la Houssière, a présenté les bénéfices de l’opération La rue aux enfants. Organisée tous les ans, elle a pour objectif de gommer la frontière entre l’école et la rue et de permettre aux enfants de s’approprier l’espace public qui les entoure.
L’appropriation, c’est sans doute l’un des maîtres mots, qui a émergé de cette première journée. Qu’il s’agisse des espaces, mais aussi des règles et des représentations, comme l’ont montré les intervenants qui se sont intéressés, dans l’après-midi, à l’influence des pratiques éducatives familiales sur l’assimilation des codes scolaires. Facteur de réussite, tout particulièrement dans les familles d’enseignants, cette appropriation met au contraire bien des familles en difficultés. « On les récupère fracassées, a témoigné Fred Marco, directeur du centre socioculturel Georges Déziré. Il nous faut alors travailler à leur redonner confiance ».
Renouer avec des dynamiques collectives
Aménagement des espaces, interactions avec le monde extérieur, qualité du dialogue avec les familles, respect mutuel des acteurs… tels sont certains des leviers à actionner pour construire un système de valeurs commun à toutes les familles. Et tenter d’enrayer ainsi le terrible cercle vicieux qui fait que l’école, loin de réduire les inégalités, a aujourd’hui tendance à les creuser.