En partenariat avec la Ville, Habitat 76 a planté la première forêt urbaine du département. Les collégiens en profitent déjà, en attendant que ça pousse.
Au Bic Auber, les cinq vénérables érables se sentent moins seuls. Sur une parcelle de 1500 m2 située entre les petits immeubles et le collège Paul-Éluard poussent des chênes, des pins sylvestres, des châtaigniers, des bouleaux, des charmes, des merisiers. Et aussi des sureaux, des chèvrefeuilles, des troènes, des églantiers, des viornes, des charmilles, des genêts, des houx, des lierres et même des cheveux d’ange. Et en lisière, des framboisiers, des groseilliers, des argousiers et des amélanchiers. Mais ça ne se voit pas encore beaucoup. Car cette forêt vient de naître. C’est une forêt pouponnière. Elle a été plantée la semaine dernière.
Planter une nouvelle forêt en pleine ville, ce n’est pas banal, mais c’est tendance. Ça s’appelle une micro-forêt ou forêt urbaine, d’après une méthode développée par le botaniste japonais Akira Miyawaki, décédé cet été à l’âge de 93 ans. La méthode consiste à planter beaucoup d’arbres et de végétaux sur un espace restreint, puis à laisser faire la nature, en limitant au maximum l’intervention humaine. Plantés très serrés (au moins trois arbres au mètre carré), ces végétaux vont pousser vite pour aller chercher l’espace, l’oxygène et la lumière. Normalement, au bout de trois ans et un peu d’entretien, on se retrouve avec une belle petite forêt faussement sauvage en pleine ville. Et au bout de 20 ans, une vraie mini-forêt qui dans la nature aurait mis deux siècles à atteindre la même taille.
Depuis quelques années, les forêts urbaines sont donc tendance dans le monde et en France, et commencent à pousser un peu partout dans les villes, de Paris à Toulouse. Bien que née au Japon, la forêt urbaine n’est pas un jardin japonais, car elle doit être constituée d’essences locales. On ne va non plus y organiser des pique-niques ou ramasser des champignons, car elle est très dense. Sa fonction est de créer de la fraîcheur en ville, de lutter contre la pollution de l’air et, bien sûr, de valoriser le cadre de vie de ses riverains.
Saint-Étienne-du-Rouvray, qui ne manque pas de forêts ni de bois, et dont le nom lui-même cache un arbre (le rouvre est un petit chêne), a donc sa première forêt urbaine, à l’initiative du bailleur Habitat 76 et en partenariat avec la Ville. C’est même la première forêt urbaine du département. Sa conception a été confiée il y a environ un an au pépiniériste Jean-Paul Dupuis, qui a commencé par inventorier les essences de la forêt du Rouvray, afin de savoir ce qu’il allait pouvoir planter au Bic Auber en respectant l’écosystème local. Jean-Paul Dupuis a ensuite préparé le sol avec de la paille de lin (pour le nourrir et garder l’humidité), puis le début de la mise en terre de près de 6000 plants a eu lieu mercredi 10 novembre.
Option forêt au collège
Les premiers à s’y être collés sont une vingtaine de collégiens de Paul-Éluard, venus en voisins avec le proviseur de l’établissement Régis Delabrière. Ils ont d’abord échangé avec Jean-Paul Dupuis, le pédagogue papa pépiniériste de la forêt, avant de mettre la main à la terre. Avec le sourire et enthousiasme. Cette participation des collégiens à la plantation n’est pas anodine: elle entre dans le projet d’établissement « du concret à l’abstrait », soit une façon de découvrir, apprendre et comprendre des choses sur le terrain avant d’en étudier la théorie. Pendant le temps de leur scolarité à Paul-Éluard, 120 collégiens vont régulièrement rendre visite à la forêt qu’ils ont participé à planter, pour y faire de la SVT (science et vie de la Terre), des maths (en mesurant la croissance des arbres) et du français (en découvrant le nom des plantes).
Certains de ces collégiens habitent au Bic Auber, et les locataires aussi sont impliqués dans la forêt urbaine: le samedi, ils ont participé à la suite de la plantation de la forêt urbaine, et auront l’occasion d’y revenir, que ce soit pour la regarder pousser ou grappiller quelques fruits rouges la saison venue.
Dominique Langlois, la forêt a un nom
La première forêt urbaine créée par Habitat 76 dans le département va porter le nom d’une figure bien connue du quartier Bic Auber, Dominique Langlois. Disparu en novembre 2020, ancien conseiller municipal à Saint-Étienne-du-Rouvray, Dominique Langlois fut longtemps administrateur d’Habitat 76 et surtout représentant des locataires au sein de la CNL (Confédération nationale du logement). Un hommage bien mérité pour un homme qui a consacré une partie de sa vie à défendre les intérêts et le bien-être de ses concitoyens. Une pancarte à son nom a été présentée pendant l’inauguration officielle de la forêt urbaine, et les officiels ont eux aussi participé à la plantation.