Touché par le virus informatique, le conservatoire intègre depuis 2020 un cursus de musique assistée par ordinateur (MAO). De quoi créer de nouvelles passerelles entre les jeunes et la théorie musicale.
Lundi, 18h : le silence règne au premier étage du conservatoire. Pourtant, cinq jeunes Stéphanais sont en train de composer, dans la même pièce. Un casque vissé sur les oreilles, ils tapent du pied ou dodelinent sans quitter leur écran des yeux. Bienvenue à l’atelier « MAO », comprendre : musique assistée par ordinateur. Pour la deuxième année, ce cours propulse les jeunes mélomanes dans le XXIe siècle où la musique se fait aussi (surtout ?) avec des logiciels.
Deux fois par semaine, les élèves se familiarisent au programme Ableton live. Ce logiciel incontournable de la production musicale actuelle est utilisé par la plupart des DJ en herbe mais aussi par les artistes les plus célèbres comme les Français Daft Punk, David Guetta ou l’artiste tricolore le plus écouté dans le monde, DJ Snake. Ableton Live permet en théorie de composer dans tous les styles grâce à une bibliothèque de sons quasi infinie. Il intègre une large variété de guitares, basses, batteries, mais aussi tous types de claviers ou instruments à vent. Ajoutez à cela une collection complète d’effets (delay, distorsion, réverbération, flanger…) ou encore la possibilité de varier les tonalités, les rythmes… En bref : tout est possible pour qui sait s’en servir.
Une approche détournée de la théorie
«Je montre aux élèves comment fonctionne le logiciel mais ça, ils le comprennent assez vite, reconnaît Luc Gosselin, professeur de saxophone au conservatoire qui a créé et anime l’atelier MAO. Il compose sur l’outil numérique depuis une dizaine d’années. C’est pour la partie composition que j’inter- viens le plus, parce que l’ordinateur ne fait pas encore tout, tout seul. » En cours, chaque élève apprend aussi à se servir d’un contrôleur à pads : une machine-instrument reliée à l’ordinateur qui permet de se débarrasser du clavier et de la souris pour composer, mixer et improviser en direct, y compris sur une scène ! « C’est une nouvelle façon d’appréhender l’apprentissage de la musique, détaille Luc Gosselin qui se réjouit de l’intérêt qu’apporte la MAO pour la théorie musicale. Certains élèves me demandent pourquoi leur composition ne sonne pas juste. Je leur montre qu’ils mélangent parfois du ternaire et du binaire ou qu’ils superposent un mi-bémol et un mi-bécarre. Et soudain ils me disent «ah c’est ça que la prof nous expliquait en cours de formation musicale et où je n’écoutais pas !» Créer des passerelles, la MAO le fait aussi entre les élèves et leurs professeurs, et entre les disciplines. « C’est un cursus complet, la composition va rapprocher les joueurs de différents instruments lorsqu’ils voudront collaborer et les professeurs seront forcé- ment impliqués ».