Fiche d’identité
Naissance : 20 janvier 1881, Gueures (76).
Décès : 20 février 1918 (37 ans), La-Ville-aux-Bois-lès-Pontavert (02).
Profession : tisserand, puis employé des Chemins de fer.
Grade : caporal clairon, 233e Régiment d’Infanterie, classe 1901.
Campagne contre l’Allemagne : 3 août 1914 au 20 février 1918 (3 ans et 6 mois).
À quoi ressemblait-il ?
Albert Tannay mesurait 1m67. Il avait le crâne rasé et les yeux gris.
Il avait un niveau d’instruction primaire, ce qui signifie qu’il avait terminé l’école primaire à 13 ans, sans passer le certificat d’études.
Il était marié à Armande Violette et habitait au 48 rue de Paris, à Saint-Étienne-du-Rouvray.
Biographie
Albert Arsène Tannay naît le 20 janvier 1881 à Gueures (76), dans la région de Dieppe. Sa mère, veuve depuis 3 ans, est ouvrière de filature et élève seule trois enfants âgés de 6 à 12 ans. Albert Tannay n’est pas reconnu par son père et prend donc le nom de sa mère. Il grandit à Gueures.
À l’âge de 21 ans, il se présente, comme tous les jeunes hommes de son âge, aux bureaux de l’Armée pour y effectuer son service militaire obligatoire. Une fiche de renseignements est dressée, dans laquelle on apprend qu’il exerce la profession de tisserand. Il effectue ses classes d’arme au sein du 51e R.I. (Régiment d’Infanterie), dont la caserne se trouve à Beauvais (60), et est promu caporal-clairon. Durant la période, il perd sa mère, décédée à Gueures à l’âge de 54 ans. Il est maintenu aux Armées jusqu’à la fin de l’année 1905. À cette date, Albert Tannay rejoint ses frères et sœurs, qui se sont installés à Saint-Étienne-du-Rouvray. À son tour, il y emménage et est probablement embauché comme tisserand à la Société Cotonnière, la grande entreprise textile de la commune. Il a alors 25 ans.
À 29 ans, en 1910, le jeune homme épouse Armande Violette, une journalière vivant à Longueil (tout près de Gueures), de sept ans sa cadette. Il la connaît depuis quelques années (au moins depuis 1902), puisqu’il s’agit de la belle-sœur de son frère aîné.
Vers 1912, le couple s’installe au 48 rue de Paris, à Saint-Étienne-du-Rouvray. Albert Tannay abandonne son poste de tisserand et devient employé des Chemins de fer. Les ateliers de chemin de fer situés au nord de la ville sont le deuxième employeur de la commune après la Société cotonnière.
En août 1914, la guerre éclate. Albert Tannay, alors âgé de 33 ans, est immédiatement mobilisé au sein du 22e R.I.T. (Régiment d’Infanterie Territoriale), essentiellement composé de soldats de la rive gauche rouennaise. Le stéphanais quitte Rouen deux semaines plus tard, en direction d’Arras (62). Il ne connaît ses premiers combats qu’à la fin du mois de septembre 1914. Par la suite, le 22e R.I.T. circule entre la Somme et la Champagne, où il se partage entre offensives et travaux d’aménagement de tranchées. D’octobre 1915 à mars 1916, le régiment tient des tranchées de deuxième ligne dans le secteur de Tahure (51), à l’Est de Reims. Il y subit des bombardements, mais est relativement protégé par rapport aux camarades de première ligne.
Au mois de mars 1916, Albert Tannay est affecté à la 6e compagnie de mitrailleuses du 233e R.I. Il s’agit d’un régiment de réserve, théoriquement affecté aux missions de travaux et de ravitaillement, et composé de soldats d’une trentaine voire d’une quarantaine d’années. Le stéphanais rejoint le 233e R.I. alors que ce dernier profite d’une période de repos dans les Vosges, où il se reconstitue. En juin 1916, le régiment part dans la Somme, entre Amiens et Péronne, afin d’occuper le secteur face aux Allemands. Les combats y sont quotidiens et les soldats ne profitent qu’occasionnellement de quelques jours de répit avant de repartir au front. En novembre 1916, Albert Tannay et son régiment retournent en Champagne, tout d’abord à l’est de Reims, près de Souain (51). Les conditions y sont dantesques. L’Historique régimentaire raconte ainsi qu’en février 1917, dans les tranchées, les soldats ont de l’eau jusqu’à la ceinture à cause des précipitations. En avril 1917, le 233e R.I. remonte au nord de Reims, à Craonne (02), pour combattre. Albert Tannay y est blessé par un éclat d’obus. Parce qu’il revient au front sans avoir attendu sa guérison complète, le stéphanais reçoit la Croix de guerre et une citation à l’ordre de la Brigade. À partir de juin 1917, les soldats du régiment sont embarqués en train vers les Flandres, où ils doivent participer aux attaques menées par l’armée anglaise.
Jusqu’en août, les hommes vivent des heures douloureuses, à cause… de la pluie. Celle-ci tombe pendant des jours sans discontinuer. Le terrain est transformé en mer de boue où la circulation est impossible et de nombreux soldats ont les pieds gelés. En décembre 1917, le 233e R.I. est redirigé vers le secteur de Craonne, pour y faire des travaux de défense. Les tranchée sont régulièrement visées par l’artillerie ennemie. Dans la matinée du 20 février 1918, alors qu’Albert Tannay se trouve en première ligne, un obus tombe sur une réserve de grenades tout près de lui. Il est mortellement blessé et succombe, à l’âge de 37 ans.
Citation à l’ordre de la Brigrade du 16 août 1917 : « Caporal consciencieux et dévoué, a rempli à différentes reprises et sous un violent bombardement les fonctions d’agent de liaison. Blessé à Craonne le 16 avril 1917 est revenu incomplètement guéri reprendre son service au front ».
Citation posthume à l’ordre du Régiment, 2 mars 1918 : « Homme de devoir, a toujours exécuté, avec le plus grand sang-froid et le plus grand dévouement, toutes les missions qui lui étaient confiées : blessé une première fois le 16/04/1917, a été tué en première ligne par l’explosion d’un dépôt de munitions ».
Anecdote
Les deux jeunes neveux d’Albert Tannay, fils de l’un de ses frères aînés, participent également à la guerre. Respectivement âgés de 19 et 20 ans en 1914, ils vivent toutes les plus grandes batailles du conflit. En avril 1918, l’aîné (Albert Mouchard, 23 ans) est tué, deux mois après son oncle Albert Tannay. La famille est donc doublement en deuil. En décembre 1919, le plus jeune des neveux, Alfred Mouchard (alors âgé de 24 ans et héros de guerre), épouse la veuve d’Albert Tannay, Armande Violette (sa tante par alliance, âgée de 31 ans) et vient s’installer avec elle au 48 rue de Paris.
Sources : fiche matricule, fiche MdH, actes de naissance, de mariage et de décès, Livre d’Or de Saint-Étienne-du-Rouvray, J.M.O et Historique régimentaire des 22e R.I.T. et 233e R.I.
Autrice : Ariane Biard, professeure d’Histoire-Géographie et Lohan THIRION, 3eD, collège Paul Eluard, 2024.